Voilà un jour que j’attendais depuis mes 12 ans. 18 ans que je correspondais par Skype avec elle. Lizzie habitait Ottawa. Et moi, Toronto. Jamais nous n’avions pensé à nous rencontrer. La raison ? La peur de l’inconnu pour ma part. Se cacher derrière un clavier et un écran d’ordinateur, c’était tellement facile ! Je connaissais tout d’elle, enfin, je le pensais. Et elle, elle connaissait une bonne partie de moi, de mon histoire. Il ne se passait pas un soir sans que je lui envoie un petit message. De même pour elle. Je n’avais jamais révélé son existence ni à mes amis ni à ma famille ou à mes précédentes conquêtes. Je ne l’avais fait qu’une fois. Et elle m’avait quittée par jalousie. Donc, je préférais taire son existence non pas par honte mais plutôt par envie. Envie de quoi ? De garder ma petite amie ou conquête près de moi. Mais aussi de pouvoir continuer à parler à Lizzie. Cela me faisait énormément de bien.
Habillé d’une chemise bleue et d’un pantalon de costume, j’avais quitté le bureau. Une journée de travail dans les pattes, j’avais finalement réussi à partir dans les temps. « Hey Lizzie ! Notre petit rendez-vous de tout à l’heure te convient toujours ? ». Je lui avais envoyé ce petit message sur le temps de midi afin de me rassurer aussi. Par habitude, j’allais passer me prendre un Starbucks. J’étais plutôt accro au café. Mais je m’abstins. Je voulais être frais et ne pas sentir le café pour notre première rencontre. J’arrivais avec quelques minutes de retard et entrais dans ce café du centre ville que j’aimais particulièrement. J’étais là, posté près de la porte, cherchant. Qui ? Je ne sais pas. D’ailleurs, il m’était impossible de savoir à quoi Lizzie ressemblait. Je souris timidement. Etait – elle déjà là ? Se demandait – elle qui venait d’entrer ? Finalement, elle non plus ne savait pas qui chercher. Zut alors, nous aurions du penser à un signe pour se distinguer…

Et dire que je pensais que nous allions nous rencontrer dans les règles de l’art… Plusieurs fois, je m’étais demandé comment cela allait se passer. J’en avais rêvé aussi d’ailleurs. Mais jamais je ne pensais que cela allait se dérouler d’une telle manière. Moi, là, devant la porte à regarder à gauche et à droite où se trouvait Lizzie. D’ailleurs, est – ce que c’était son vrai prénom ? Pour ma part, je lui avais donné mon deuxième nom. Pourquoi ? Dans le but de rester anonyme. Enfin, surtout parce que je n’aimais pas Maximilien et je préférais largement Jules. Alors, pour une fois que j’avais pu choisir… Je me refusais de partir tant que je ne l’avais pas trouvée. Mon regard allait dans tous les sens. Je vis une jolie rousse se diriger vers la porte de sortie. Elle entra en collision avec moi. Il faut dire aussi que j’avais vu qu’elle se déplaçait mais n’y portais pas plus attention que ça. Elle s’excusa presque machinalement. Et aller le croire ou pas. Là, directement, je reconnus ma Lizzie avant même qu’elle me dise qu’elle devait rejoindre quelqu’un. Je lui fis alors un de mes sourires charmeurs et la pris par les épaules. Je levais son menton afin de pouvoir voir ses yeux. « Lizzie ? ». Je ne l’avais peut – être pas reconnue du premier coup dans le café mais quand même. Depuis le temps que l’on discutait, je n’osais pas croire que nous allions nous louper. Je la connaissais par cœur. Elle parlait comme elle écrivait. Ses mots qu’elle avait utilisés me faisaient tellement penser à elle. Habituellement, j’étais plutôt tactile. Mais là, j’étais gêné de la situation. Si bien que je n’osais pas la prendre dans mes bras. Et puis, elle était fiancée maintenant. Pas question de remettre son couple en doute. « Je suis tellement heureux de te voir ! Je ne t’ai pas fait mal, au moins ? ». Je lui frottais machinalement le bras pour lui faire du bien.

Lizzie ne semblait pas à l’aise, stressée même. Bon, il était plus facile pour un homme de cacher ses sentiments, ses impressions. Il faut bien le dire ! Je lui souris et la regardais avec mon regard charmeur comme pour la mettre en confiance. « Ne t’en fais pas, Lizzie. Nous nous sommes retrouvés, c’est le principal, non ? ». Je caressais doucement son bras. Je ne me rendais pas compte de mon geste à vrai dire. Je me rappelais bien rapidement qu’elle avait un petit ami. Il n’apprécierait peut – être pas que je la touche de cette manière.
J’étais un homme plutôt musclé. Enfin, je ne le montrais pas. Mais j’aimais prendre soin de moi. Je trouvais donc cela amusant qu’elle me demande si j’ai eu mal. « Oh non, ne t’en fais pas ! ». S’asseoir, oui, c’était une bonne idée. Je me dirigeais donc vers une table au fond du café mais près de la fenêtre. J’aimais assez bien la lumière naturelle. Dans mon bureau, il y avait une immense baie vitrée qui prenait tout un mur. Cela me permettait d’avoir une belle vue sur Toronto. Lorsque je devais réfléchir, je me tournais et contemplais ce que la nature me donnait. « Ici, ça te va ? ». J’étais passé devant elle, non par impolitesse mais parce que j’avais ma petite idée de l’endroit où je voulais me trouver. Je lui tirais la chaise afin qu’elle s’assoie. Une fois fait, je pris place face à elle. Comment je l’imaginais ? Pas rousse, plutôt brunette. Avec des yeux verts. Un peu comme elle d’ailleurs. « Ce n’est pas très important. Tu es beaucoup plus jolie que dans mes pensées ! ». Cette phrase était à double sens. Elle pouvait penser que je l’imaginais moche. Alors que pas du tout ! M’enfin, j’espérais qu’elle le prenne dans le bon sens. « Colin est resté chez vous ? ».

Mon père était chef d’entreprise. J’avais donc été élevé avec les codes de la haute société. Je savais comment me tenir avec une femme. A un certain moment, cela avait été de trop pour moi, surtout pendant mon adolescence. Mais maintenant, je remerciais mes parents de m’avoir donné cette éducation. J’avais énormément de chance. Tenir la porte, tirer la chaise ou encore laisser ma place dans le bus à une femme enceinte, c’était mon quotidien. N’allez pas croire que je suis l’homme parfait non plus. Je déteste avoir tort par exemple. Je tiendrai le morceau jusqu’au moment où l’autre laisse tomber. Enfin soit, telle n’est pas la question… « Oui, vraiment vrai ! J’avais un peu peur aussi. Mais je suis tellement heureux de te rencontrer que cela me passe au – dessus. ». Je lui souris. Un serveur vint nous donner la carte. Je le remerciais avant qu’il ne parte. Je ne sais pas si Lizzie avait prévu de manger avec moi. Je le lui proposerai plus tard. Cependant, je préférai ne pas être le premier à dire ce que je voulais boire. Je comptais plutôt la suivre. Si elle disait un jus de fruit, j’en prendrai un autre mais toujours dans cette catégorie. Je ne sais pas si je me suis bien fait comprendre. « Oui, peut – être ! ». Aller savoir pourquoi mais j’avais plutôt tendance à me méfier de ce Colin. Certes, je ne le connaissais pas. Mais Lizzie en parlait tellement en bien non stop qu’il devait y avoir quelque chose derrière. J’espérais juste qu’il ne lui faisait pas de mal. Je pense que je ne pourrais pas le supporter surtout en sachant tout ce qu’elle a vécu… « Oh, mais c’est très beau June ! J’adore. Tu préfères que je t’appelle comment alors ? Lizzie ou June ? ». Je lui souris, attendant sa réponse. C’était peut – être le bon moment pour lui annoncer que, moi non plus, je ne lui avais pas donné mon bon prénom ? « Tu sais, j’ai fait la même chose que toi. Je t’ai donné mon deuxième prénom. En réalité, je m’appelle Maximillien. Mais, je le trouve un peu long. Et le préfère largement Jules. J’espère que tu ne m’en veux pas ? ». J’avais envie de lui prendre la main mais je m’en abstins. A la place, je lui faisais l’un de mes regards charmeurs.