Voilà quelques jours que je venais au cabinet sans même en avoir envie. J'ai d'ailleurs pris une journée de repos en début de semaine, espérant qu'être seul m'aiderait à me ressourcer. Je m'étais fait des illusions puisque rien n'a changé. J'étais tourmenté, tout simplement. Cette dispute avec Analiya me peinait. Tellement que j'avais plusieurs fois hésité à aller chez elle afin de présenter mes excuses. J'aurai pu la retenir lorsqu'elle est partie, lui dire que je ne pensais pas qu'à mon porte feuille, et m'excuser dès le début. Mais à quoi bon ? Elle avait peut-être raison. Malgré ça, j'aime mon métier. Et je ne regrette pas de défendre des malfrats. Je pense que tout le monde a le droit à une seconde chance. Mais bon, là n'est pas la question. Mes pensées étaient sans cesse tourner vers Analiya. Notre dispute tournait en boucle dans mon esprit, cherchant un indice à la raison de son refus de tenir cette affaire. Mais rien n'y faisait. Peut-être était-ce simplement parce qu'elle était une femme et qu'il était inconcevable pour elle de défendre un violeur. Certainement un truc de féministe.  
Je lève doucement la tête en entendant frapper à la porte de mon bureau. Sans dire mot, je me lève pour accueillir l'arrivant. Mon sourire disparaît lorsque je vois Analiya. Vous en faîtes pas, je suis juste venue récupérer mes affaires. Dit-elle alors qu'elle prend son bloc note et un crayon posés sur mon bureau. Ma gorge est nouée. Au fond de moi, je sais que je dois la retenir. La dernière fois, je l'avais viré du cabinet. Ou était-ce elle qui était partie ? Je pense qu'il s'agit des deux. Attends. Lui dis-je presque timidement. Je ne sais pas vraiment quoi lui dire. Mais il est bon d'avouer une chose, je n'avais pas envie de le perdre. Et voilà que je joue le mélodrame. Je me gratte l'arrière de la tête, gêné. Ecoutes, je m'excuse pour ce que je t'ai dis. J'avance vers elle, faisant le tour de mon bureau.

Ce qui est dit est dit... Elle n'a pas tord. Mais je sais que j'y avais été trop fort, je sais que je n'avais pas mâcher mes mots. Après tout, je suis comme ça. Impulsif, tout simplement. Je sais bien comme je suis. J'ai besoin de dire ce que je pense, sans forcément y réfléchir certes. J'avance encore vers elle, me rapprochant de plus en plus. Je peux à présent sentir son parfum. Une odeur enivrante. J'espère que votre carrière continuera comme ça... Je peux y aller? Je n'ai rien pour la retenir. Je réfléchis, je me creuse les méninges afin de trouver une excuse pour qu'elle reste. On ne pouvait pas en rester là, c'était impossible. Non. Je me gratte une seconde fois la tête, faisant demi-tour vers mon bureau. J'ouvre mon tiroir et sort un chéquier. Ton stage n'est pas censé être rémunéré, mais c'est pour ton bon travail. On avait convenu ça avec le patron. Voilà une belle excuse qui allait me faire perdre une partie de ma paye. Mais bon, elle allait rester quelques minutes de plus. Et peut-être qu'une autre idée allait me venir pour la retenir. Je remplis le chèque en silence et me dirige vers elle afin de le lui donner.

J'en veux pas. Je la vois déchirer le chèque sans même y jeter un coup d'oeil. Je soupire, ne sachant que faire de plus. C'était une tête de mule. Un âne fixé dans ses idées. Il est alors temps pour moi d'abandonner, et tant pis si elle s'en va. Elle venait de m'énerver. Moi, petit être impulsif. C'est comme ça que vous faites? Vous donnez de l'argent pour être pardonné? Si c'est le cas, je suis désolée mais je ne fonctionne pas comme ça. J'émets un rire nerveux tout en m’asseyant à mon bureau. Elle est prête à partir. Tant mieux, il valait mieux que ce soit ainsi. Avant que je ne dise des choses que je regretterai plus tard. Il n'est pas question de me faire pardonner. Des excuses verbales suffisent, je ne vais pas me jeter à tes pieds et te supplier. Non, je suis bien trop fier. Et si elle n'était pas capable de tourner la page, tant pis pour elle. Je pense avoir trop souffert par le passé grâce à Svetlana et à mon frère pour me jeter aux pieds d'une gamine. Tu peux partir. Bonne continuation à toi. Je prends mon paquet de cigarettes dans le tiroir de mon bureau et m'en allume une, tournant la tête vers la baie vitrée afin de profiter de la vue de mon bureau. S'en était trop, je n'ai plus rien à lui dire, tout simplement. Elle pouvait disposer, elle était congédier et je ne voulais plus entendre parler d'elle. Quel fou de croire qu'elle était bien plus qu'une étudiante, qu'une stagiaire.

Elle s'en va, tout simplement. Sans rien ajouter. Dans un sens, il n'y a rien à ajouter. J'éteins ma cigarette dans le cendrier, et prends ma tête entre mes mains. J'ai cette sensation de vide. Comme si un fantôme était resté dans mon bureau. Comme si elle était toujours là. Encore une fois, mon mauvais caractère a prit le dessus. Comme d'habitude, mon passé m'ayant changé avait resurgit sans même que je m'y attende. La porte s'ouvre à nouveau, sans que je m'y attende. Analiya.Vous m'avez virée. Parce que j'ai demandé à regarder de derrière une vitre, vous avez décidé que je n'ai pas les épaules pour ce boulot. Mais vous n'avez pas chercher à comprendre quoi que ce soit. J'ai déjà mis mes valeurs de côté dans la première affaire qu'on a traité ensemble. Vous savez très bien que j'ai la carrure pour assumer ce boulot, même si plus tard je me spécialiserais sûrement pour pouvoir appliquer mes valeurs au lieu de les contourner. C'est ça que vous ne comprenez pas. Des excuses, c'est bien. Mais c'est pas assez. Vous savez que vous perdez un élément mais vous vous en fichez parce que vous refusez d'admettre que vous vous êtes planté. Je pousse un soupire et me lève de ma chaise. Analiya n'avait pas tord sur certains points, mais je ne comptais pas l'admettre. Je suis bien trop fier pour ça. Le problème Analiya est que pour le moment tu n'as pas le choix. Il faut que tu te forge une carapace te permettant d'assurer toutes les affaires possibles. Lui dis-je calmement. Mon ton est doux, posé. Je n'ai pas envie d'élever la voix, de me disputer avec elle. Elle n'avait peut-être pas tord, mais j'avais moi aussi raison sur certains points. Je me suis excusé. Pardonnes-moi de t'avoir parlé ainsi. Mais je ne m'excuserai pas d'avoir voulu te pousser. Je m'approche d'elle, doucement. Je suis calme.