La nuit, d'une noirceur intense était déjà bien avancée, lorsque vous décidez de grimper sur le toit de votre immeuble. Vous avez passé beaucoup de temps ici, à boire, à parler, à rigoler. Au fil du temps, c'est devenu votre refuge. T'étais bien là, aux côtés de Rosie, les pieds dans le vide. Pendant un bref instant, tu restes silencieuse, incapable de faire abstraction de la vue. T'es comme hypnotisée. Aspirée. « cet endroit, j'vais jamais en avoir assez. » Avec elle, c'est pas comme avec tous les autres. Non. Rosie, c'est l'une des rares personnes qui a réellement de l'importance à tes yeux. Peut-être même la seule. Entre vous deux, c'est pas juste de l'amitié. C'est beaucoup plus fort que ça. T'arrives pas à l'expliquer. « ça fait longtemps qu'on était pas monté ici toutes les deux, ça m'avait manqué. » Tu lui souris. Un sourire sincère, doux, tendre. Un sourire qui vient du cœur. T'as pas l'habitude de mettre des mots sur ce que tu ressens, mais avec Rosie, c'était facile. Tu te sens toi-même avec elle et c'est ça qui te plaît le plus chez elle. Une douce brise soulève tes cheveux dorés. tu fermes les yeux, lorsque le vent te souffle doucement au visage. Tu te sentais libre. Tu te sentais bien. Tellement bien. bip. bip. Le portable de Rosie. T'ouvres doucement les yeux et tu rigoles, intriguée. « c'est qui à cette heure là ? l'une de tes conquêtes ?  » Tu éclates de rire avant de lui prendre rapidement son portable des mains. « putain, si t'as reçu un sexto laisse moi répondre, j'vais trop me marrer. » Ne lui laissant pas la chance de reprendre son portable, t'ouvres rapidement son sms. D'un coup, ton sourire disparaît, ainsi que ta bonne humeur. C'est quoi ce bordel ? « tu m'expliques ? » Tu lui rends son portable plus violemment que prévu. « matt ? » T'es complètement paumée.

Andie ça avait été un coup de foudre amical. Le genre de personne qui me ressemblait, à qui je pouvais tout dire. Je l’avais rencontré au début de mon road trip et elle m’avait suivi jusqu’à devenir ma colocataire. Qu’est-ce que je savais d’elle ? Pas grand-chose. Elle n’en savait pas plus sur moi. Je lui avais juste parler de Matt, sans jamais dire la façon dont il était parti. Je lui avais aussi parler de mon besoin d’évasion. De cette envie de changer de vie. M’amuser, profiter de ma jeunesse. Ett durant cette dernière année mes vieux démons étaient revenue, en pire. Si lorsque Matt était partie j’avais décidé de refaire la fête comme avant, durant mon road trip j’avais enchaîné les soirées, les drogues et les alcools. J’avais l’impression d’être libre, que rien ne pouvait m’atteindre et j’étais rentré au bercail. Et je l’avais revu. Et ça faisait vraiment bizarre. Mais ce soir-là, j’étais avec Andie. J’essayais de ne pas penser à Matt. D’oublier notre conversation. Peut-être qu’il oublierait aussi son invitation à dîner. Je n’avais pas dit à Andie que je l’avais revu. J’avais peur de sa réaction. Les cheveux au vent, les yeux rivés sur les lumières de la ville, je répondis :

« Ouais c’est clair, on est trop bien ici. » Je marquais une brève pause ajouta : « On aurait peut-être dû prendre une bouteille d’alcool. »

Assise les pieds dans le vide, rien ne pouvait m’atteindre. J’étais à proximité des nuages et des oiseaux. J’avais l’impression d’être au-dessus de la ville. Au-dessus de tout. C’est alors que mon portable se mit à sonner. Je rigolais lorsque Andie me demanda si c’était l’une de mes conquêtes. A règle d’or chez moi ? Ne pas donner mon numéro à mes conquêtes. C’était moi qui les contactais pour se voir et non l’inverse. Je la laissais prendre mon téléphone, je ne craignais rien. Je n’avais rien à cacher. C’est alors qu’elle vit un message de Matt. Génial, il choisissait bien son moment celui-là. J’attrapais mon téléphone qui avait cogner contre le béton du toit pour lire à mon tour ce message. Je verrouillais mon téléphone et répondis :

« Je… J’ai accompagné une copine de la fac’ à une séance de dédicace organisée là-bas. J’ai espéré ne pas le voir mais il était là et il est venu me parler. Et… » Je marquais une brève pause. Je savais que ce qui allait suivre ne plairait pas à Andie. Mais je me devais d’être honnête avec elle : « Et je crois que je l’aime encore… »

Ma voix se brisa dans le silence. C’était dit. J’avais mis des mots sur ce que j’avais ressentis lorsqu’on s’était revu. Je ne pouvais pas résister à son regard, à ses yeux ni à son sourire. Il avait su me rendre heureuse importance et me donner de l’importance. Et si pendant trois ans, j’avais voulu me battre toute seule, aujourd’hui j’avais besoin de lui. Et ça, je savais qu’Andie ne pourrait pas le comprendre. Pour une raison que je ne comprenais pas, elle avait une dent contre lui, sans même le connaître vraiment.