C’était dans cette même boîte de nuit, il y a maintenant deux ans que j’avais fait la connaissance de Livia. J’avais accepté de me joindre à plusieurs de mes camarades de la faculté de mathématiques pour une soirée en discothèque. Bien sûr, c’est en marchant à reculons que j’y avais mis les pieds. Tout simplement parce que je n’aime pas l’ambiance qui règne dans ce genre de lieu. Je n’aime pas danser également. Je préfère rester assise à la table à garder les verres pendant que les autres s’amusent. Tout simplement, parce que moi, sur une piste de danse, ce n’est pas la joie. Je n’ai aucun sens du rythme, je balance mes bras, à droite et à gauche, je marche sur les pieds, je bouscule les autres, même ceux que je connais pas, bref, j’ai l’air d’un éléphant dans un magasin de porcelaine. Je n’ai aucune grâce et je le sais. Ma maladresse prend le dessus systématiquement, alors je préfère limiter les dégâts en restant dans mon coin. Pourquoi est-ce que je viens dans ce cas-là ? pour être franche, je n’en sais rien, sûrement pour faire plaisir à mes amis, mais au final, ils s’en moquent, puisqu’ils savent très bien s’amusé sans moi. Heureusement, quelque part, vu que je ne suis pas la reine de la fête ! Enfin, ce fameux soir, j’étais, comme à mon habitude, installée à une table, à siroter un cocktail, pendant qu’ils s’éclataient sur la piste de danse. La musique me bourdonnait dans les oreilles, trop forte à mon goût. Je n’étais pas à mon aise et je n’avais qu’une seule envie en tête, celle de rentrer chez moi. Finalement, n’y tenant plus, je me levais d’un bon, renversant mon verre à moitié plein ou à moitié vide si vous préféré, sur la table, juste au moment où Livia s’asseye devant moi. Visiblement, elle était fâchée que je ne les rejoigne pas sur la piste de danse.

Le boom boom de la musique me fracassait les oreilles et j’avais horreur de ça. Je n’hésitais que quelques secondes avant de décider de partir. Si je me dépêchais, personne ne s’apercevrait de mon départ. Seulement, dans la précipitation, je renversais mon verre de cocktail, juste au moment où ma meilleure amie rejoignait la table. Pas de bol. Si j’avais voulu être discrète, je n’aurais pas fait mieux. Voyant que j’étais à moitié debout, elle me demanda, mais je le sentais comme une accusation, même si ce n’était pas bien méchant, si j’allais partir. « Non, non ! » fis-je, en secouant la tête de gauche à droite, espérant être convaincante. « Je voulais juste aller aux petits coins ! » Qui donc espérais-je convaincre avec un mensonge aussi gros ? Livia peut-être, mais elle avait vu juste, j’espérais filer discrètement à l’anglaise, ni vu, ni connue. Seulement, elle m’avait prise en flagrant délit. J’eu un pauvre sourire en coin, ce sourire qu’elle connaissait pas cœur, tant je le faisais souvent. Mon petit sourire gênée d’être comme j’étais. Résignée, je finis par me rassoir, tandis qu’elle me demandait si je ne voulais pas venir avec elle sur la piste, en ajoutant que les autres étaient complètement pétés. Oui, je l’avais remarqué, certains me faisaient même honte. Je secouais une nouvelle fois, négativement, la tête. Je ne préférais pas, aussi, j’attrapais mon verre, désormais vide, pour m’occuper les mains. Je n’aurais pas dû venir, je le savais. Ce genre d’endroit, ce n’était décidément pas pour moi. Livia ajouta ensuite, me suppliant presque, que je pouvais bien boire un verre avec elle. Oui, ça, je pouvais. Tant que je restais sur ma chaise, tout allait bien, je ne risquais pas de provoquer la moindre catastrophe. « D’accord, pour un verre ! » dis-je, avec un autre sourire timide.

Pourquoi continuais-je de venir en boîte de nuit avec ma bande d’amis puisque j’avais horreur de ça ? C’était la question à un million de dollars, celle à laquelle, il faut absolument répondre pour gagner le jackpot. Et bien sûr, je ne pouvais pas y répondre. Enfin, presque pas. Disons que je crois qu’au fond, je voulais simplement faire plaisir à mes amis et ne pas les décevoir en restant sagement à la maison. Sauf qu’en agissant ainsi, c’est moi que je décevais, parce que je ne faisais rien d’autre que m’ennuyer. Bien sûr, lorsque Livia m’avait surprise en train d’essayer de me sauver en douce, j’avais essayé de la jouer en fine en prétendant vouloir aller aux petits coins, mais ma meilleure amie n’était pas sotte, elle savait très bien que c’était une excuse idiote, la première qui m’est traversé l’esprit. J’eu une moue boudeuse lorsqu’elle m’indiqua qu’elle avait parfaitement compris ce que j’avais eu l’intention de faire et qu’il était inutile que je mente. J’étais grillée. Je ne pouvais rien faire d’autres. A part, peut-être rester à la maison la prochaine fois que le groupe aurait l’idée d’une sortie de ce genre. Après tout, que je reste chez moi dans mon studio avec mon chien ou que je vienne dans ce genre de soirée, le résultat était le même puisque je faisais tapisserie ou banquette, voire carrément les deux. Finalement, j’acceptais de boire un dernier verre, avant de partir, juste pour faire plaisir à ma meilleure amie. Encore une fois, je faisais passer les autres avant moi. C’était moi tout craché, incapable d’être égoïste ne serait-ce qu’une seule fois. Livia semblait ravie et commanda aussi deux autres verres, il faut dire que le mien, je n’en avais bu qu’une parie puisque je l’avais renversée dans ma tentative de fuite. Mon amie finit par me dire que je pourrais profiter de la soirée et de l’ambiance générale pour me trouver un copain ou une copine. Ce n’était pas faut, mais il me suffisait de jeter un œil autour de moi pour comprendre que personne ne me convenait. « Oui, je pourrais, sauf que ça, » dis-je, en désignant les gens qui dansaient ou qui buvaient autour de nous, « c’est pas du tout mon style. Autant les mecs que les filles d’ailleurs. » Je n’étais pas spécialement difficile, mais ce n’était pas pour moi. Je préférais être avec une personne simple, pas une bimbo superficielle ou un obsédé sexuel.

Je sais très bien pourquoi les soirées ne m’ont jamais intéressées. En boîte où organisées par des amis, c’est toujours la même chose, je m’y ennuie ferme. Et une bonne ambiance n’y changera rien, ça ne me plait pas, tout simplement. Même en me forçant, je n’y arrive pas, je préfère faire banquette, surveiller les verres, on sait jamais sur qui on vas tomber dans ce genre d’endroits. Imaginez qu’un petit malin ou une petite maline, croit amusant de verser de la drogue dans le verre d’un pote … enfin bref, ça ne me plait et je sais pourquoi, c’est à cause de mes années lycée et de cette soirée ou j’avais osé draguer une fille pour la première fois de ma vie. Ça s’était très mal terminé et j’en avais souffert. Depuis, je me méfie des soirées comme de la peste. Ce n’est clairement pas pour moi. Pourtant, je m’accroche, je veux faire plaisir à mes proches, alors je viens et je meure d’ennuie. Livia semble l’avoir compris, même si elle ignore pourquoi je m’obstine à venir si c’est pour rester assise. Je n’aime pas danser, la musique ne me plait, j’ai des goûts de vieux disent certains, et puis je danse très mal. Enfin, ça, ce n’est qu’un prétexte, parce que bon, certains se trémoussent comme s’ils avaient le feu aux fesses et ils n’en ressentent aucune honte. Je dois bien l’avouer, ils me font rire. Livia approuve. « Je devrais peut-être essayer le speed dating ! » dis-je, en rigolant. Quoiqu’en vérité, faire le connaissance d’une personne en quelques minutes et passé à la suivante, ça ne m’intéresse pas. Nos boissons arrivèrent et ma meilleure amie paya, avant de me dire qu’une prochaine fois, nous n’aurions qu’à faire faut bon à nos amis pour une soirée entre filles avec restaurant et cinéma. Je n’en demandais pas tant. « Tu peux compter sur moi ! » je réponds, avant de boire une gorgée de mon verre. Ce cocktail est vraiment délicieux, avec juste ce qu’il faut de sucre.